jeudi 29 novembre 2007

Présentation de Frédéric d’Agay

Portrait de Frédéric d'Agay, copyright Tristan de Lagasnerie

Les jeunes années :

Je suis né à Saint-Raphaël (Var) en 1955, dans une famille provençale qui comptait parmi les siens l’écrivain Antoine de Saint-Exupéry d’un côté et Alphonse Karr de l’autre.
Études classiques aux lycées de Saint-Raphaël et de Bastia. J’écris à 10 ans une tragédie en alexandrins “Orphée et Eurydice”, me prenant pour un nouveau Racine … ce qui fait toujours sourire mes amis lacaniens.
En 6e un professeur de dessins m’initie à Paul Klee : avec la découverte de Fernand Léger à Biot et de la Fondation Maeght, ce sont les premiers émois de l’art moderne. Après mon bac, je m’inscris en droit à Aix-en-Provence. Dans une demeure familiale du cours Mirabeau, je découvre l’histoire de la Provence et quelques témoins des siècles passés. Je m’attache avec passion aux cours de Provençal et de littérature provençale de Louis Malbos, conservateur du Musée Granet qui marqueront à jamais mon goût pour la Provence, son histoire et sa littérature. Il m’initie également à l’histoire de l’art en me montrant dans son bureau les dessins du musée et me racontant l’histoire des collections aixoises. Conversations dans les derniers salons aixois un peu fanés, beaucoup dansé, beaucoup sorti, beaucoup musardé…

Le choix de la Provence et de l’histoire du XVIIIème :

Diplôme de droit en poche (1977) et service militaire effectué à Brest dans la Marine, dans la tradition de la famille maternelle bretonne, je “monte “ à Paris… Licence en histoire (1979), maîtrise (1980, « Une entreprise économique nobiliaire au XVIIIe siècle : La compagnie des mines de Provence »). Je décide de poursuivre mes études d’histoire dans la lignée du professeur Jean Meyer dont la « Noblesse bretonne » me fascine. C’est la première étude parue sur ce sujet en France et je pense être capable de peindre la « Noblesse provençale ». Il faut d’abord préparer une thèse de IIIème cycle et Jean Meyer, aussi historien de la Marine, me fait choisir un sujet qui nous intéresse tous les deux : les officiers de marine provençaux au XVIIIème siècle… Je m’y plonge avec ardeur et découvre que la marine est tout à fait provençale au XVIIIème et non pas bretonne comme on croit… Et surtout que la noblesse provençale en avait fait un élément important de stratégie et constitué là un réseau très puissant. Découverte de l’intérêt de la sociologie, de l’ethnologie et de la prosopographie sociale. Je rêve d’être ethno-historien. Mais il faut trouver un job, j’entre donc à la Compagnie générale maritime grâce à Jean de Bodinat, un merveilleux gentilhomme lettré à la suite des moralistes du XVIIe siècle, au cabinet du président (1981-83). J’y reste deux ans et demi à préparer des discours, des PV de conseils et assemblées, et comme la nomination promise à New York n’arrive pas, je m’en vais…

Mes premières publications :

Je réussis à convaincre Simone Gallimard au Mercure de France de publier les Lettres d’Italie du président de Brosses – ouvrage introuvable amené par Emmanuel de Waresquiel pendant notre premier voyage en Italie. Avec ce premier contrat en poche, je vais travailler dans les bibliothèques italiennes et refaire le voyage du cher Président… Le livre* sort en 1986 . Je me remets aussi à ma thèse, mais la suppression de la thèse d’Etat, m’amène à mélanger ma thèse de IIIe cycle et celle d’Etat en une thèse Nouveau Régime soutenue finalement, malgré de nombreuses embûches, en 1996 « Les Officiers de marine provençaux au XVIIIe siècle : vers une tentative de cohésion de la noblesse provençale à la fin de l’ancien régime ».

Je décide de rester dans l’édition, j’entre alors aux éditions Berger-Levrault comme collaborateur et directeur de collection (co-éditions régionales) (1985-87) et je publie les premiers guides de jardins français : Le guide des Jardins de Provence et de la côte d’Azur (avec Nice-Matin) et Le guide des Jardins de Bourgogne (avec le Bien public).

Gestion de l’œuvre de Saint-Exupéry :

La mort de ma grand-mère d’Agay en 1986 bouleverse tous mes plans. En effet, ma famille me demande de m’occuper de sa succession et donc de l’oeuvre de son frère Antoine de Saint-Exupéry en liaison avec son éditeur Gallimard. Il faut créer une société qui regroupe les héritiers du sang et détenteurs du droit moral et me voilà Gérant de la société civile pour l’œuvre et la mémoire de Saint Exupéry (1987-2001)

À ce titre, je gère tous les droits de l’oeuvre de l’écrivain-pilote Antoine de Saint Exupéry (1900-1944). Il faut mettre en place des négociations avec les éditeurs du monde entier (rappelons que le Petit Prince est un des ouvrages les plus traduit au Monde), des cessions de droits, des traductions, renégociations d’accords anciens, publications d’inédits, préparations des oeuvres complètes, etc. En France avec Gallimard et aux Etats-Unis avec l’éditeur Harcourt Brace. Arrivent de nombreux projets audiovisuels (négociations avec des producteurs et réalisateurs du monde entier), des adaptations théâtrales et musicales, spécialement au Japon, Etats-Unis (création de l’opéra du petit Prince à l’opéra de Houston en 2003 avec Francesca Zambello), Allemagne, Autriche (création d’un opéra de Nikolaus Schapfl au festival de Salzbourg, 2003), en Argentine et en Italie. Dans ce pays, je collabore pendant plusieurs années avec Achille Mauri, producteur et éditeur, neveu de l’éditeur Bompiani, qui mène le projet d’une adaptation télévisuelle du petit Prince. Merveilleux temps de travail à Milan et dans le monde entier où nous rencontrons beaucoup de réalisateurs et d’hommes de cinéma et de télévision. Surtout j’apprends d’Achille Mauri un mode de vie, de perception des autres, fait de générosité et d’élégance.

Et aussi, avec ce grand collectionneur, nous fréquentons beaucoup les biennales de Venise, les galeries, les ateliers d’artistes. Nous nous revoyons tous les ans au « Davos » des éditeurs, libraires et auteurs, qui a lieu à Venise tous les ans à la fin du mois de janvier organisé par la Fondation Mauri, sur l’île de San Giorgio.

Au cours de tous mes voyages, je tiens un journal sur des carnets, agrémentés de dessins et de croquis au crayon, à l’encre, lavis, aquarelle puis feutre noir que j’adopte définitivement. J’écris mon journal toute l’année mais ne dessine qu’en voyage, sur de grands albums également.

Je crée en 1994 une société destinée à gérer les droits dérivés de l’oeuvre, la Sogex dont je suis le gérant jusqu’en 2001. Le merchandising du Petit Prince lance un héros français qui représente autre chose que Disney et les mangas…. C’est une opération européenne et asiatique qui me permet de me confronter aux agents du merchandising et aux cabinets de marques au quatre coins du monde, qui connaît un certain succès et toute mon organisation devient une espèce de modèle pour les successions d’auteurs…


La Mémoire de Saint-Exupéry :

Concomitamment, il faut essayer de réunir les projets de mémoire et les hommages rendus dans le monde entier au « Philosophe du lien » je crée, avec Bruno Faurite et Franck Béjat à Lyon, l’Association “Espace Saint Exupéry” et le projet de Fondation Saint Exupéry dont je suis le président (1990-2003). Espace Saint-Exupéry regroupe 53 associations exupériennes dans 23 pays du monde. Nous montons avec ces merveilleux amis lyonnais un projet de Musée et de Fondation Saint-Exupéry au château de Saint-Maurice de Rémens, (Ain). L’association est à l’origine des manifestations et hommages très variés : le billet de 50F de la banque de France à l’effigie de Saint-Exupéry, l’aéroport Antoine de Saint-Exupéry à Lyon, les timbres de la Poste Française à l’effigie de Saint-Exupéry et du petit Prince, les monuments Saint-Exupéry de Tarfaya (Maroc), ParisVIIe, Toulouse, de la place Bellecour à Lyon, de la forêt Saint-Exupéry du désert du Neguev (Israél), des fêtes du centenaire de sa naissance dans le monde entier en l’an 2000.

J’ai été pendant 15 ans une sorte d’ambassadeur de la culture et de la langue française dans le monde, (spécialement aux Etats, Japon, Allemagne, Argentine, Canada, Suisse, Russie) en participant à toutes les cérémonies d’hommages rendus à Saint-Exupéry, inaugurations, manifestations, anniversaires, baptêmes…Planétarium Antoine de Saint Exupéry d’Oslo (Norvège), rue Saint-Exupéry à Fribourg (Suisse), plaque sur sa maison de New York. Je participe à l’organisation d’expositions à Copenhague, Paris, Tokyo, New York (Morgan library), à des colloques internationaux, donne des conférences sur la vie et l’œuvre d’Antoine de Saint Exupéry à Paris, New York, Oslo, à l’Université d’Oujda (Maroc), au Festival de littérature de Berlin, au salon du livre de Genève. Je participe à des émissions télévisées en France, Italie, Russie, Suisse, aux lancements de projets culturels et associatifs (Fondation Saint-Exupéry créée par Dominique Lesage en Pologne, associations de Agnete Langaard au Danemark, d’Igor Chamraev en Russie, de Inès Desazards de Montgaillard en Suisse), à la création du Musée Saint Exupéry de Hakone (Japon).

L’association ouvre en outre une galerie “’Espace Saint Exupéry” à Paris, rue Gassendi, XIVe avec un programme d’expositions sur Antoine de Saint-Exupéry qui présentent de nombreux objets et souvenirs inédits tirés des collections personnelles et familiales. La galerie expose égalemement des artistes contemporains pendant cinq ans Alice Aladjem, Carmen Artigas, Carmelle Bourgeois, Hamid-Efflam Fakhoury, Marine d’Harcourt, Jean Letourneur, Sebastiano Mauri, Jean-Marc de Pas, Madeleine Tézenas du Montcel, Fabio Tita.

Parallèlement, j’achète sans relâche dans le monde entier toutes les oeuvres de « Saint-Ex » dans toutes les langues du monde, les biographies les revues, les articles, les études, les enregistrements, les films, les photographies et organise un réseau d’amis grâce aux associations pour recenser et réunir dans la bibliothèque de l’Espace une masse de documentation qui doit servir de médiathèque de la future Fondation.

Enfin, cette activité m’amène aussi à participer de façon active aux publications, biographies, études et articles sur Saint Exupéry (Album de la Pléiade, Catalogues d’expositions, Oeuvres complètes de la Pléiade, préfaces etc.…)

Cela m’a amené à créer l’association “Vol de nuit/vuelo nocturno“ en 2002 pour aider l’enfance défavorisée en Argentine, avec la grande comédienne Marie-Christine Barrault qui est un symbole du bonheur de vivre. Grâce à elle nous avons constitué une équipe de bénévoles qui nous a permis de construire une bibliothèque en Patagonie et d’aider des écoles, des associations, d’organiser des ateliers et des cours de français.

J’ai participé activement pendant 10 ans au Conseil de l’association « Petits princes » qui réalise les voeux des enfants malades, créée par Marie et Dominique Bayle, présidée par le Pr. Philippe Biclet qui est un exemple de réussite associative pour les enfants. Et aussi comme membre du jury et Président d’honneur du Prix Saint-Exupéry/Valeurs-Jeunesse de livres d’enfants, créé par Solange Marchal en 1987. Conseiller de Paris, elle veut relancer la lecture pour les jeunes et crée ce prix pour récompenser un album et un roman écrits en français et qui prônent les valeurs exupériennes. En outre elle récompense un livre écrit en français à l’étranger, c’est le prix Francophonie confié aujourd’hui à Noëlle del Drago. Grâce à son enthousiasme, son courage et sa ténacité ce prix fête cette année son 20e anniversaire.


Retour à l’histoire et à l’édition :

Tout en menant ces actions « exupériennes », j’essaie de poursuivre mes travaux historiques et mon œuvre provençale. Je suis alors dans la lignée de Maurice Agulhon et de son livre « La vie sociale en Provence intérieure au lendemain de la Révolution » (Sté d’Etudes robespierristes, Paris, 1970). Je publie en 1987 le volume consacré au « Var » dans la collection des Grands notables du Premier Empire, dirigée par Louis Bergeron et Guy Chaussinand-Nogaret, au C.N.R.S. et à l’E.H.E.S.S. Cet ouvrage est l’équivalent d’une thèse de prosopographie sociale, au terme d’une enquête de plusieurs années pour rétablir les listes des notables que la constitution de brumaire a substituée aux ordres de la France d’Ancien Régime. Et pourtant rien de nouveau, la Révolution apparaît donc dans le Var avoir renforcé le pouvoir et la fortune de la bourgeoisie déjà en place… la bourgeoisie de village si bien décrite par Agulhon…et accélérer pour certains, l’accession à la noblesse qui reste le modèle de toutes ces familles. Cf. le livre de Arno Mayer « La persistance de l’Ancien régime, l’épopée de 1848 à la Grande guerre», Flammarion, 1983).

En 1988, c’est un gros article dans la nouvelle et éphémère Revue de la Société d’histoire de la Restauration lancée par Emmanuel de Waresquiel et Benoît Yvert, « La première restauration dans le Var », qui est en quelque sorte la suite de mon enquête varoise du Premier Empire. La préparation de ma thèse me fait publier divers articles à ce sujet et participer à des colloques, mais l’éloignement des sources provençales, l’impossibilité de consacrer du temps aux recherches et à l’écriture en dehors de ma thèse qui ne peut se soutenir qu’en 1996, m’empêchent de poursuivre mes différents projets de livres sur la Noblesse provençale ou l’armée de Condé, par exemple.

Les responsabilités associatives se multiplient qui finissent par prendre un temps fou car ce sont toujours de grands engagements pour moi. Au sein de l’Association d’entr’aide la Noblesse Française (ANF) dont je suis membre du conseil d’administration et commissaire aux preuves pour la Provence (1978-2000) et je relance et réorganise la bibliothèque comme conservateur. À Marseille je donne un coup de main à mes amis Evelyne Brémondy et Gérald Ulrich pour sauver le musée provençal des ATP de Château-Gombert comme Président des Amis du musée. Je réussis à glaner un peu de temps pour deux beaux livres sur la Provence aux éditions du Chêne commandés par Anne Souleau-Joffre, les introductions et appareils critiques de deux volumes de la nouvelle collection « L’Histoire en mémoires » d’Emmanuel de Waresquiel chez Perrin et quelques collaborations au « Dictionnaire Napoléon » de Jean Tulard et au « Dictionnaire du Grand Siècle » de François Bluche chez Fayard.

De 2001 à 2003 pour reprendre mon souffle et pied dans la carrière d’historien je démissionne d’à peu prés toutes mes fonctions et peux ainsi me remettre à écrire un projet de scénario d’un feuilleton historique sur Marseille pour Canal Plus, qui n’est finalement pas pris. Je dirige ensuite un beau livre chez La Martinière consacré aux trésors de la Bibliothèque du Sénat, « D’encre et de lumières » avec le photographe Jérémie Bouillon et une quarantaine d’auteurs. C’est une grande réussite après une année formidable dans la bibliothèque et les archives du palais du Luxembourg (2004-2005). En 2005-08, chercheur associé au Centre de Recherches du château de Versailles, je suis chargé du programme “Les Méridionaux et la cour” auprès de Béatrix Saule et de l'organisation du colloque sur ce thème. En 2006-09 à la demande d’Henri Bovet je suis Editeur et directeur de collection (Histoire Sciences humaines) chez Tallandier. Je suis nommé administrateur de la Fédération historique de Provence fin 2010 et publie ma thèse en avril 2011 chez Honoré Champion sous le titre "La Provence au service du Roi 1637-1831, officiers des vaisseaux et des galères." Je travaille actuellement à la rédaction d’un "Voyage en Provence", pour la collection Bouquins chez Robert Laffont, et d'un ouvrage sur le second ordre en Provence, pour les éditions Tallandier. Depuis 2009 je suis membre du comité du festival Sole Luna de films documentaires sur la Méditterranée et l'Islam qui se tient à Parlerme tous les ans début juillet et créé par Lucia Gotti Venturati.


* : Le livre : Les lettres du Président de Brosses ont été rééditées en 2007 dans la nouvelle version poche de la collection au Mercure de France.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Bonne aussi est leur cuisine ! Bon moment ai je passé à lire votre article ! merci

George de Glücksbierg a dit…

Cher Monsieur,
Pourriez-vous "m'éclairer" sur les liens de votre famille avec celle de François Geofroy (1608-1688)seigneur de la Tour et Claude Joseph Geofroy (1687-1753)secrétaire du Roi. Merci et salutations amicales. G. de G.